Royaume-Uni
David Baulcombe
Prix Balzan 2012 pour l'épigénétique
Les caractères de tous les organismes vivants sont déterminés par leur constitution génétique (génotype) et par l’interaction de cette dernière avec l’environnement durant la croissance et le développement. A l’origine on pensait que l’information génétique était uniquement constituée par les instructions codées dans la séquence d’ADN de l’organisme. Au cours des 50 dernières années on a recueilli de plus en plus de preuves montrant que des informations d’un autre type sont conservées lorsque les cellules se divisent, et même d’une génération à l’autre. L’étude de ces phénomènes a été appelée épigénétique et, de même que l’on peut cartographier le génome et identifier les marqueurs génétiques, on peut parler d’épigénome et de marqueurs épigénétiques. La recherche sur les bases moléculaires de l ’information épigénétique est l’un des secteurs les plus actifs de la biologie actuelle. De longues molécules d’ADN dans la cellule sont « empaquetées » et organisées grâce à l’action de protéines appelées histones. Des modifications particulières des histones ainsi que des changements réversibles de l’ADN lui-même (l’addition ou la suppression de groupes méthyliques) déterminent si les gènes dans des segments locaux d’ADN sont actifs ou non (expression génétique). Ces modifications peuvent être temporaires ou bien survivre à de nombreuses divisions de la cellule. Les travaux de nombreux chercheurs ont permis de comprendre la mécanique du marquage épigénétique, ceux de David Baulcombe sont parmi les plus significatifs. David Baulcombe a découvert que des petites molécules d’ARN jouent un rôle déterminant dans la régulation de l’expression génétique. Travaillant sur des plantes, il a d’abord montré que ces molécules peuvent rendre les gènes silencieux après que leur ADN ait été transformé en ARN mais avant que les protéines soient produites. Cette mise sous silence des gènes est déterminante dans le développement (différenciation cellulaire et formation des organes) mais joue aussi un rôle important dans la façon dont les plantes se défendent contre les virus. Ces travaux peuvent également avoir des implications au niveau de l’évolution car certains types de marqueurs épigénétiques peuvent persister d’une génération à l’autre. David Baulcombe a aidé à élucider la complexité et les origines des différentes classes de petites molécules d’ARN, et il a montré comment elles peuvent déterminer des modèles de méthylation épigénétique d’ADN. Beaucoup de ce que Baulcombe a découvert peut s’appliquer aux animaux, ce qui montre qu’il s’agit là de processus anciens qui se sont développés au début de l’arbre de l’évolution, à l’origine des plantes et des animaux multicellulaires. Les recherches de David Baulcombe ont fait grandement progresser notre connaissance de la biologie moléculaire des plantes. Elles ont eu également de fortes implications dans la recherche médicale. Les chercheurs tentent de comprendre pourquoi certaines cellules (cellules souches) peuvent se différencier en plusieurs types de cellules alors que la plupart des autres ont un destin figé. Cela est lié à la façon dont l’ADN est marqué épigénétiquement. Des progrès ultérieurs dans ce domaine nous aideront à comprendre la « dédifférenciation » qui survient dans certains cancers, la façon dont les cellules souches nécessaires pour différentes thérapies peuvent être fabriquées et, plus généralement, nous permettront de mieux connaître le rôle fondamental des petites molécules d’ARN dans le développement des mammifères.