États-Unis
Omar M. Yaghi
Prix Balzan 2024 pour matériaux nanoporeux pour les applications environnementales
Omar Yaghi a fondé la chimie réticulaire, la science de la construction de structures chimiques à partir de blocs moléculaires. Il est le pionnier des réseaux métallo-organiques (MOF), des structures organiques covalentes (COF) et des structures imidazolates zéolitiques (ZIF), des matériaux réputés pour leur surface extraordinairement grande et leur nanoporosité. La porosité de ces structures dépasse de loin celle des matériaux poreux traditionnels. Cette porosité très élevée augmente considérablement leur utilité dans le stockage et la production d’énergie propre, y compris le stockage et la séparation de l’hydrogène, du méthane et du dioxyde de carbone, ainsi que dans la production d’eau propre, les supercondensateurs et les systèmes conducteurs. L’approche modulaire développée par Omar Yaghi a entraîné une croissance exponentielle dans la création de nouveaux matériaux d’une diversité et d’une complexité chimiques sans précédent, comme en témoigne l’abondante littérature sur les MOF.
Au début des années 1990, il a proposé d’utiliser des blocs de construction moléculaires et des liaisons fortes pour créer des matériaux cristallins. À l’époque, la communauté scientifique considérait que ce concept était chimiquement impossible parce que les liaisons fortes entre ces blocs moléculaires donnaient généralement des solides amorphes et mal définis. Cette perception a changé en 1995 lorsque le professeur Yaghi est parvenu à démontrer, pour la première fois, que les ions métalliques pouvaient être reliés par des liants organiques chargés négativement pour former des liaisons fortes et créer des matériaux à structure cristalline ordonnée. Cette découverte révolutionnaire, publiée dans la revue Nature, a permis le développement d’une nouvelle classe de matériaux : les MOF.
Reconnaissant le potentiel des MOF pour exploiter la puissance des gaz et des molécules comme l’hydrogène, le dioxyde de carbone et l’eau, il a compris la nécessité de prouver leur stabilité architecturale. En 1998, il a rapporté la mesure des premières isothermes d’adsorption de gaz sur un MOF fabriqué à partir de clusters d’oxyde de cuivre et de téréphtalate, démontrant ainsi la porosité permanente du MOF. Cela a conduit en 1999 à une publication dans Nature, très souvent citée, dans laquelle il a décrit le MOF-5, devenu désormais emblématique. Le MOF-5 présentait une très grande porosité, avec une surface d’environ 3 000 mètres carrés par gramme, et une grande stabilité architecturale. La porosité et la robustesse record du MOF-5 ont établi le domaine des MOF et marqué le début des travaux pionniers de Omar Yaghi sur l’utilisation de la porosité des MOF pour le stockage de l’hydrogène, le captage du carbone et la récupération de l’eau présente dans l’air.
Les MOF sont devenus les matériaux préférés pour ces applications en raison de leurs pores de taille nanométrique, une propriété fondamentale pour obtenir de l’air, de l’énergie et de l’eau propres. Il a également mis au point une stratégie pour créer des MOF dont la surface peut atteindre 7 000 mètres carrés par gramme, confirmant ainsi l’immense potentiel de ces matériaux.
À la suite de ces réalisations, Omar Yaghi a découvert et développé une autre classe de matériaux, décrite dans un article de Science en 2005 : les COF. Les COF sont entièrement composés de molécules organiques maintenues ensemble par des liaisons covalentes, les liaisons les plus fortes en chimie. Les COF sont donc très durables et, en raison de leurs composants légers, ce sont les matériaux poreux les moins denses. Il a développé des COF avec des tailles de nanopores et des environnements spécifiques pour compacter l’hydrogène et le dioxyde de carbone, et pour capter l’eau présente dans l’air du désert, le tout dans des conditions réelles.
Son approche des liaisons fortes et la précision de sa chimie confèrent à ces matériaux une grande stabilité thermique et chimique, ce qui leur permet d’être utilisés et recyclés pendant de nombreuses années. La porosité très élevée de leurs structures permet une utilisation économique dans le stockage de gaz pour les énergies propres, avec en plus l’avantage d’une capacité et d’une efficacité élevées. Les découvertes révolutionnaires de Omar Yaghi ont fourni des outils essentiels pour affronter la crise climatique.